Peter Weller, la robostar
Les mauvaises langues auront tôt fait d’affirmer que Peter Weller est , et restera, le «Robocop» (GCR) de chair et de fer dont le géniteur, Paul Verhoeven, a fait un mythe. La carrière de Peter Weller s’arrête-t-elle pour autant à cette interprétation androïdale? Certes, non. Avant de porter cinq mois durant les vingt kilos de polyuréthane et de caoutchouc qui composent (l’uniforme» du robot qui l’a fait héros, Weller avait déjà fait une belle carrière sur grand écran. Voilà onze ans, il obtient son premier rôle dans «Les joyeux débuts de Butch Cassidy et le Kid» avec Richard Lester au gouvernail. En 1981, c’est dirigé par Alan Parker qu’il réapparaît dans Shoot the moon («L’usure du temps»). Cinq ans plus tard, il est le héros d’«Apology» (Antarès/Travelling) avant d’être celui des (Aventures de Buckaroo Banzaï à travers la 8e dimension».
Ce n’est effectivement que «Robocop» qui placera Weller sous les feux des projecteurs, un rôle ingrat puisque l’interprétation fait beaucoup plus appel à des talents de mime et à des capacités physiques qu’a un véritable travail d’acteur. Qu’importe puisque le succès du film lui permet de décrocher le premier rôle de (Leviathan» (Antarès/Travelling) et une place de choix dans «Blue Jean Cop» (CBS-Fox). Peter Weller ne compte pas par-mi les grands d’Hollywood. Il n’en n’a d’ailleurs que faire. «Robocop 2» lui servira de nouveau de tremplin, mais cette fois-ci, les producteurs auront du «verser beaucoup plus d’argent» dans son escarcelle qu’auparavant. N’est-ce pas là le prix du succès?
Au Festival de Cannes 1990, le dernier film d’Alan Parker, « Corne see the paradise », en a surpris plus d’un. Sur un sujet brûlant et idéal pour les polémiques (l’internement dans les camps des « Japonais-Américains » après l’attaque de Pearl Harbor), il nous a donné un film tendre, presque mièvre, passant sous silence les événements les plus pénibles et les plus violents. Où était le cinéaste de « Midnight Express » et « Mississippi Burning », celui dont les coups de gueule accompagnaient les films en coup de poing, celui qui disait encore, il y a quelques années, qu’il ne lui déplaisait finalement pas d’être considéré comme un « provocateur ». Année 1986, présentation de « Birdy » à Paris, peu avant Cannes. Bref rappel des accusations de racisme lancées par une partie de la critique française à propos de « Midnight Express ».
Réponse : « Que la critique française aille se faire foutre. » Lorsque le film a été projeté en séance du soir, le public s’est mis debout et a ovationné pendant dix minutes. « Vous vous rendez compte : dix minutes ! J’en avais les larmes aux yeux et j’étais prêt à penser que la France était le plus beau .pays du monde. Et en ouvrant les journaux, le lendemain matin, je découvre que la moitié des critiques a trouvé le film « raciste »… Est-ce qu’ils savaient ce qu’était une dictature en Turquie ? Si j’ai fait dire à mon personnage ces mots terribles sur « la race des porcs », c’est, au contraire, pour montrer que vous pouvez vous laisser aller aux pires extrémités quand vous êtes au fond de l’enfer. Si je ne lui avais pas faire dire ces mots, j’aurais été malhonnête. Comment peut-on encore croire que chaque dialogue d’un personnage reflète la pensée du réalisateur ? » Il lui faut bien cinq minutes pour se calmer, le temps qu’il comprenne que je ne fais pas partie de la « clique » qui l’a condamné. « Midnight Express » est un film sur l’espoir. Pour une fois, la phrase publicitaire sur l’affiche le résume bien : « Il ne faut jamais désespérer. » Ce film, qui raconte le calvaire d’un jeune dealer dans les geôles turques, est un hymne à l’individu, traversé d’éclairs lyriques propres à susciter l’émotion. Déjà un style coup de poing. Le 3roducteur David Puttman ajoute : « Vous savez, les gens ont été très injustes vis-à-vis d’Alan. Quand j’ai vu « Midnight Express », j’ai été ébahi. Je ne pensais tas qu’un metteur en scène aussi jeune pouvait avoir la force et le courage de faire un tel film. Couvert d’Oscars (Oliver Stone pour le scénario, Giorgio Modorer pour la musique) et de Golden Globes, le film a fait une carrière internationale triomphale. Il est même devenu un film-culte. Mais Parker ne se souvenait que des attaques qui lui avaient mis les nerfs à vif. Le Prix spécial du Jury à Cannes, pour « Birdy », a quelque peu apaisé ses tourments. De retour de la guerre du Vietnam, un jeune homme se réfugie dans le silence et se prend pour un oiseau. Jusqu’à un envol dérisoire… « Je voulais émouvoir avec cette histoire, pas faire rire », dit Parker. Et il ajoute avec prudence : « Qu’on ne voie surtout pas dans ce film un film sur le Vietnam. Le livre parlait de la guerre de Corée. Nous l’avons actualisé. Mais je ne vois pas de quel droit moi, Anglais, je serais allé ‘faire la morale aux Américains à propos d’un conflit auquel je n’ai pas participé. « Birdy » est un film sur le côté normal et anormal qu’il y a en chacun de nous. C’est un film qui parle au cœur. C’est aussi un film relativement optimiste. Le réalisateur a refusé une fin tragique. Pour Parker, « Birdy » est un film d’apaisement et de réconciliation. Et le fait d’avoir touché le cœur du jury de Cannes est une juste récompense. Année 1987, présentation à Paris d’« Angel Heart ». Une horrible gueule de bois.
La violence prend différentes formes pour le réalisateur anglais qui a mis en images (chocs) l’exceptionnel Midnight Express, le récent Bienvenue au paradis et le fantasmagorique Pink Floyd-The Wall.
Mickey Rourke, il m’a invité à venir en boîte avec lui hier soir. Plus jamais je ne le suivrai. » Une brève apparition de Mickey Rourke dans la chambre, encore plus mal en point que lui, ne l’empêche pas de reprendre ses esprits et de parler avec enthousiasme de son film : «J’ai choisi Mickey Rourke, parce qu’il a l’air d’un pompiste au chômage. Il est vulnérable et attendrissant. Apparemment, Rourke voulait jouer « le diable », mais De Niro est parfait pour le rôle. « Mettre ces deux là en présence était un vrai plaisir. « Angel Heart » est un polar avec des résonnances fantastiques. Y aurait-il un côté Méphisto en Parker ? « Peut-être bien », avouait-il en souriant… Avec « Mississippi burning », une enquête du FBI sur la disparition de trois militants pour les droits civiques dans un Sud dominé par le Ku Klux Klan, rebelote ! Nominations aux Oscars, triomphe public, mais attaque en règle de la presse américaine et française. Le réalisateur noir, Spike Lee, s’indigne. « Dans le film, tous les Noirs sont passifs, explique-t-il.
C’est comme si la lutte pour les droits civiques avait été gagnée par les Blancs. C’est un mensonge et un mauvais coup porté aux Noirs. Cette fois, Parker ne monte pas au créneau aveuglément. Il s’explique, s’excuse presque : « Mississippi burning » est un épisode très particulier dans lequel c’est le FBI qui a eu le beau rôle. C’est vrai. Cependant, je n’ai jamais voulu dire que les Noirs n’avaient rien fait. Dans cette histoire-là, ils ne pouvaient rien faire. Mais après, ce sont eux qui ont mené le combat. » « Mississippi burning » témoigne, en tout cas, du punch de son auteur. Dès le début du film l’assassinat des militants des droits civiques une tension presque insoutenable s’installe. Parker nous plonge ensuite dans une « Amérique profonde » qui fait froid dans le dos. Gene Hackman, vieux routier du Sud, manipule les êtres, tandis que Willem Dafoe (« un pur produit de l’administration Kennedy », dit Parker) mène une lutte de principes sans tenir compte des coutumes locales ! Le principe, le droit et la ruse finissent par avoir raison de l’obscurantisme d’une ville de ploucs du Mississippi. Idéalisme ? « C’est comme ça que ça s’est passé », dit Parker, écœuré d’être une nouvelle fois victime d’un procès d’intention. Tout cela a sans doute joué sur « Come see the paradise » où, une fois n’est pas coutume, le réalisateur ménage la chèvre et le chou et choisit la voie du mélo plutôt que celle du brûlot social. Un happy-end, long à venir, réconcilie Japonais et Américains victimes des oppresseurs. Sans doute le film de transition pour un réalisateur en colère qui cherche, et trouve, difficilement, la sérénité. Mais ceux qui restent sensibles à son style « coup de poing » peuvent se replonger, avec délices, dans la trilogie que GCR sort ce mois-ci : « Midnight Express », « Birdy » et « Mississippi burning ».
Dans ces trois films, la violence rime avec l’espoir, la désespérance avec l’amour, la réalité la plus dure avec l’utopie réalisable. Au fond, Alan Parker, cinéaste d’origine anglaise et qui se veut international, n’a pas cessé de croire en l’homme. Et ses trois films sont comme des exorcismes, des descentes aux enfers qui débouchent sur un coin de ciel bleu : le vol de « Birdy » en est le symbole. Que cela ne vous empêche pas de voir ou revoir les autres films de ce metteur en scène hors-normes tels que « Bugsy Malone » (GCR), « Fame » (MGM/Film Office), « L’usure du temps » (MGM/Film Office) et « Pink Floyd-The Wall (PMV). C’est un grand spectacle…
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