La parole aux vidéoclubs

vidéoclubsPlus récemment «L’empire contre-attaque» qu’il a acheté au salon en trois exemplaires à un prix raisonnable, compte tenu de l’impact de ce titre et du nombre de locations qu’il entraîne. A côté de cela, il y a les vidéoclubs mitigés qui essaient de contenter tous leurs adhérents sans toutefois y arriver à coup sûr. La disparité des goûts est telle qu’il devient très difficile de sonder véritablement une clientèle. N’oublions pas que la vidéocassette est un marché constamment en mouvement, presque insaisissable, et plein de surprises. Un film comme «Le jour d’après», présenté à la télévision américaine, matraqué publicitairement lors de sa sortie en salles sur le territoire français, est un hit des vidéoclubs. Si les détaillants sont un peu réticents à se confier aux journalistes, on peut remarquer qu’ils ne tarissent pas de réactions et de réflexions lorsqu’ils discutent entre eux. En nous faufilant dans les stands des éditeurs, nous avons pourtant surpris une phrase qui revenait souvent concernant le flambage des prix d’achat de certaines cassettes : «Proserpine nous propose des titres forts à des prix tellement élevés qu’il nous est impossible de les amortir. D’autre part, nous sommes «obligés» de les avoir en rayon pour conserver, voire augmenter notre clientèle. C’est un dilemme !». A la question : pourquoi rendez-vous votre dernier titre «Les ripoux» (un des plus grands succès en salles en 1984) 1 500 francs HT aux détaillants ? Proserpine répond : «Nous payons les droits vidéo cher. Mais nous participons en cela au soutien de la création, surtout en ce qui concerne le cinéma français, et les sommes versées par des sociétés comme Proserpine, ou d’autres éditeurs comparables, permettent de contribuer au financement d’autres films. Nous sommes donc indissociables de la «mécanique» du cinéma qui est (et restera longtemps) la seule source d’alimentation de la vidéo. Nous vendons cher aux vidéoclubs ? C’est vrai, mais ils doivent comprendre, de leur côté, que c’est la rançon de la qualité et ils doivent se décider à adapter leurs tarifs de location au prix du film. Il y a des vidéoclubs qui louent à 15 francs voire 10 francs par jour ! C’est anormal : aucune location ne devrait être inférieure au prix d’une place de cinéma. Ce n’est encore pas cher, puisque une cassette est vue par deux ou trois personnes en même temps !». Pour en finir avec la démarche Proserpine, un gros vidéoclub de Paris, très florissant, nous a confié avoir commandé trois exemplaires des «Ripoux» uniquement pour son prestige, tout en sachant qu’il ne récupèrerait jamais sa mise. Il a ajouté que puisqu’il gagnait de l’argent sur les autres titres, il pouvait se permettre d’en perdre avec Proserpine. En revanche, on peut se poser la question de savoir si certains vidéoclubs aux résultats modestes ne seront pas tentés, après avoir acheté un «Ripoux», d’en faire deux ou trois copies pour amortir leur mise. La piraterie a longtemps épargné la France, mais depuis le décret Lang, elle a rattrapé le temps perdu… Revenons au Salon de la vidéo, troisième du nom, pour faire l’inventaire de ce qui se vend, parfois même très bien, et de ce qui stagne, voire baisse, chez les éditeurs. 70 % des commerçants que nous avons interrogés ont à peu près la même réaction : CIC et Parafrance, disent-ils, sont les grands gagnants de la bataille». Avec des titres aussi puissants que «Spartacus» (toujours très demandé), «Scarface» ou «Un fauteuil pour deux» à 490 francs HT, comment pourrait-il en être autrement ? Délais de livraison excellents, PLV assurée au maximum, sept nouveautés mensuelles toujours de haut niveau, et même si de temps en temps émerge un film moins « évident », les vidéoclubs achètent en moyenne tous les titres disponibles. GCR aussi semble revenir au top niveau, et des œuvres comme «Cristine», «Krull», ou «Les copains d’abord» font un carton chez les vidéophiles. Excellente image de René Chateau qui après avoir amorti largement tous ses titres, propose maintenant la série «Cassettes d’acier» à 250 francs sur presque tout son catalogue. Cette démarche est très bien perçue par les clubs, et aux dires de beaucoup, elle permet de restructurer les fonds de catalogue. A ce titre, les Bruce Lee sont toujours très prisés par le public ainsi que les Belmondo qui sont certainement les plus demandés, tous vidéoclubs confondus. Notons que René Chateau conserve les droits sur les anciens titres de Bebel jusqu’aux «Morfalous». Une nouveauté de choc pour les vidéophiles : «Paroles et musique» d’Elie Chouraki promis à la plus belle des carrières. Ce film a été un des must du salon en matière de précommande. « Une chose est sûre, souligne un détaillant de la région de Bordeaux, ce salon est le plus important que nous ayons vécu. Nous avons à notre disposition un choix énorme et varié à des prix (presque tous) alignés ; nous ne savons plus ou donner de la tête. Pour ma part, j’ai craqué sur «La femme publique» et «Underfire» édités par RCV. J’ai fait une grande provision de films américains chez GCR, CIC et Warner, cette dernière société ne présentant pas de grands titres pendant la durée du salon, mais son catalogue occupe un mur entier dans mon vidéoclub. De plus, j’ai pu passer chez Warner les précommandes sur la version longue de «Greystoke» à paraître en septembre». Rappelons que pour sa sortie vidéo, le «Tarzan» de Hugh Hudson se verra ramené à 2 h 50, durée initiale du chef-d’œuvre avant les coupes effectuées pour la sortie cinéma. Ce vidéoclub bordelais poursuit : «Le X est un genre à part entière dans mon magasin, et même s’il y a maintenant une profusion de petits distributeurs en ce domaine, je ne prends pas de risques et continue à faire confiance à Alpha, Scherzo, Marc Dorcel et Laure Vidéo. Tellement d’éditeurs changent les titres de leurs films pour les ressortir sous des labels différents ! En matière de X, je pense qu’il faut continuer avec les plus importants ; au moins on est sûr de ne pas avoir deux fois le même long métrage sous un titre différent. Pour revenir aux films grand public, la majorité de mes choix s’oriente sur des titres connus. Je ne suis pas capable d’investir dans cent titres par mois, je suis donc obligé de choisir et je pense que mes confrères font de même. Je ne vois d’ailleurs pas comment ils pourraient faire autrement. Je manage mon affaire et je suis déjà heureux de voir me clientèle satisfaite, même si je suis obligé de faire l’impossible sur certains titres comme «Outsiders» ou «Rocky horror picture show» chez CBS-Fox/Alliance et AMLF qui sont des films que j’affectionne tout particulièrement, mais inconnus de mes clients. Je travaille tout de même avec ces labels sur d’autres, films comme «L’addition», «Taps» ou «Un mariage» de Robert Altmanqui chez moi sont très demandés». On le voit, l’équilibre entre le choix personnel et celui du consommateur est toujours respecté, même au prix de concessions de part et d’autre. Les vidéoclubs, dans la jungle qui est la leur, réagissent en temps que «cinéphiles commerciaux» et ne se départissent jamais de l’osmose qu’ils forment avec leurs clients potentiels. Et le marketing, la PLV, les jaquettes, direz-vous. Quel est leur impact sur les réflexes d’achat ? Vaste sujet qui vaut bien une enquête. Ce sera donc notre rendez-vous pour le prochain numéro.

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